Affichage des articles dont le libellé est auteur. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est auteur. Afficher tous les articles

jeudi 26 novembre 2015

Appel à communications : journée d'étude : DE LA POLITIQUE DES AUTEURS (CINÉMA) À LA MISE EN QUESTION DE L’AUTEUR (CINÉMA & AUDIOVISUEL) - Vendredi 15 Avril 2016 - Université Paul-Valéry

DE LA POLITIQUE DES AUTEURS (CINÉMA)
À LA MISE EN QUESTION DE L’AUTEUR (CINÉMA & AUDIOVISUEL)

Université Paul-Valéry – EA 4209 : RIRRA 21
Programme de recherche : actualité esthétique du cinéma et de l’audiovisuel

Changement de date : Vendredi 15 avril 2016

Dans Hitchcock / Truffaut, un film documentaire réalisé en 2015 par Kent Jones, une dizaine de cinéastes notoires (dont M. Scorsese, D. Fincher, R. Linklater…) revenant sur le monumental entretien d’une semaine en 1962, donnent tous raison à Truffaut d’avoir œuvré pour qu’Hitchcock fasse figure par excellence de « l’auteur » en cinéma. Le cinéma selon Hitchcock, le livre issu de cet entretien et publié en 1967 fit écho à ce que Truffaut avait déjà formulé en 1955, quand il était aux Cahiers du Cinéma, comme étant « la politique des auteurs ». En 1972, La Politique des auteurs – Entretiens avec dix cinéastes est publié une première fois puis réédité en 1984 par Les Cahiers du Cinéma, avec une préface de Serge Daney. Non loin des Cahiers, mais en pleine contestation des Cahiers, la revue Positif, elle aussi motivée par « l’auteur », insiste sur le fait que la dite « politique » a été inventée par Louis Delluc dans les année 1920 puis reprise dans La Revue du cinéma de Jean-Georges Auriol.

Par-delà les débats critiques, les remises en question historiques et théoriques sur le bien-fondé de cette « politique des auteurs », deux idées, qui furent vraiment originales, en constituent le fondement. D’abord, désigner le réalisateur d’un film comme son « auteur » fait de lui l’alter ego d’un écrivain, or les écrivains écrivent seuls leurs livres et n’ont pas besoin d’une structure de production. Et puis estimer que Welles, Buñuel, Dreyer ou encore Rossellini et Antonioni, ou Renoir font des films originaux, insolites, est acceptable par toute la critique, mais leur adjoindre dans cette même estime de « l’auteur », Lang, Hitchcock, Hawks est plus difficile à admettre parce que ces cinéastes travaillent à Hollywood où ils (ne) sont (que) des directors, quand bien même certains d’entre eux auraient-ils emporté avec eux leur approche européenne du cinéma. Ce que les critiques des Cahiers du Cinéma avaient alors mis en avant c’est « le style ». Est « auteur » un cinéaste, n’importe quel cinéaste dont le spectateur peut reconnaître la présence (la patte) dans des figures de style qui traversent tous ses films, tissant ainsi une esthétique singulière, au-delà de toute considération thématique ou générique.

Or le cinéma, qui se prend très tôt à raconter des histoires, s’ouvre comme naturellement à une modalité de récit très ancienne : la sérialité. Cette dernière, par ses mécanismes caractéristiques de répétition, semble déposséder « l'auteur » de son originalité et remettre en perspective l'importance de cette notion. Pourtant, n'y a-t-il pas dès les débuts du cinéma une certaine affinité entre la conception de séries et l'émergence de l'auteur, voire du « cinéaste » ? En est exemplaire Louis Feuillade : Fantomas, Les Vampires, Judex sont réputés ainsi que ses petits films dédiés en série aux mêmes personnages (« Bébé », « Oscar », « Bout de Zan », « Barrabas »). Même chose de Charlie Chaplin, avec « Charlot » ou encore « Mabel » dont il décline les noms dans le titre et les facéties d’une bonne cinquantaine de films (courts ou moyens-métrages). Et cela n’a jamais cessé. En France, François Truffaut (encore lui !) a installé dans 5 longs-métrages un même personnage : Antoine Doinel. Aux États-Unis, dans le sillage de la tradition moderne de la Nouvelle Vague, un « auteur » tel que Richard Linklater a construit une trilogie mettant en scène un même couple de personnages évoluant dans le temps (Before Sunrise, Before Sunset, Before Midnight, entre 1995 et 2013). Les sagas hollywoodiennes contemporaines, quant à elles, ne cessent de faire revenir les mêmes créatures qui portent les films au point d'en écraser (peut-être) leurs auteurs : « James Bond », « Batman », « Alien »... Il convient ainsi de se demander ce qu'il en est dans ce cas particulier où de multiples réalisateurs participent à une même série ? Quelle place alors pour l'auteur « cinéaste » ? Quelles sont ses libertés/contraintes et comment s'exprime ou se réprime son originalité dans le cadre réputé étroit de la série ? A l'inverse, dans un cadre plus libre et moderne, quels buts poursuit un auteur de cinéma, à l'exemple de Truffaut ou Linklater, lorsqu'il élabore un projet esthétique fondé sur le principe de sérialité ?

Or, ce que le cinéma a fait et a été pendant plusieurs décennies est entré de plain-pied dans un autre territoire : « l’audiovisuel ». Une sorte nouvelle de films a vu le jour : le « téléfilm ». Les chaînes se sont de plus en plus investies dans la production cinématographique. C’est ainsi qu’une interaction à la fois culturelle, économique, mais aussi esthétique, s’établit entre les deux institutions. Dès 1955, Hitchcock avait déjà franchi le Rubicon pour mettre son talent au service du petit écran. À l’inverse, de nombreux jeunes réalisateurs débutent à la télévision, où ils forgent un style visuel propre influencé par le medium, pour ensuite rejoindre le cinéma : Robert Altman, Sam Peckinpah, Sydney Lumet, Blake Edwards, William Friedkin, Michael Mann… En particulier, le cinéma, devenu très poreux au dispositif télévisuel, en a récupéré des traits, celui-ci notamment : la conception et la fabrication de séries. Ce trait propre au medium (flux) télévisuel apparaît ainsi comme une scansion nécessaire, une technique de fidélisation du public. Quelle place alors dans ce système pour l'auteur ? On peut citer ici l’exemple des deux premières « saisons » de Twin Peaks (1990 et 1991), œuvres d’emblée destinées à une diffusion télévisuelle et conçues comme un feuilleton. Or Twin Peaks marque l’entrée de David Lynch, aidé par Mark Frost, dans le domaine de la télévision alors qu’avant cela il n’avait fait que des films de cinéma. Avec Lynch, cinéaste « artiste-plasticien », la question de l'auteur prend une nouvelle dimension dans le processus de création de l’œuvre télévisuelle sérielle et pose les jalons d'un véritable âge d'or de la série télévisée américaine, tout en offrant à d'autres cinéastes-auteurs la possibilité d'y transposer leurs styles visuels cinématographiques (Martin Scorsese, Gus Van Sant, David Fincher, Sam Raimi...). Toutefois, en règle générale, le réalisateur semble n'être, comme dans le système hollywoodien des studios, que le rouage d'un ensemble plus vaste, dont il n'a pas la maîtrise globale, laissée au tout-puissant producteur, créateur ou showrunner. Dans ce cas, quelle place lui reste-t-il ? N'est-il que le simple exécutant d'un principe édicté avant lui ou peut-il y apporter une touche personnelle et transgressive ? Par leur notoriété d'auteur, les cinéastes évoqués précédemment façonnent-il le style visuel de l'ensemble de l’esthétique de l'œuvre, même s'ils ne réalisent pas tous les épisodes de la série ? La « politique des auteurs » peut-elle finalement fonctionner dans le cadre d'une série télévisée, comme le propose Louis Skorecki (Sur la télévision. De Chapeau melon et bottes de cuir à Mad Men, 2011) à propos de Steven Bochco, co-créateur de Hill Street Blues (1981-1987) et NYPD Blue (1993-2005) ?

En puisant des exemples contemporains ou passés, aussi bien chez des cinéastes-auteurs reconnus qu’au sein de l'industrie du divertissement, nous souhaitons inviter des chercheurs d'horizons multiples à réfléchir sur la notion d'auteur au cœur de la création cinématographique et audiovisuelle, notamment à travers le prisme particulier de la sérialité.

Les questions que nous souhaitons aborder sont celles-ci :
Le mot « auteur », étroitement corrélé à la fabrique de récits littéraires, apporte-t-il une plus-value à celle des récits cinématographiques ?
Que reste-t-il de la « politique des auteurs » dans le cinéma contemporain ? Quels auteurs de cinéma porteraient trace dans leurs styles visuels de cette « politique » ?
Qu’en est-il de la place de l'auteur d'une (ou dans une) œuvre sérielle, que celle-ci soit un serial cinématographique français des années 1910, un ensemble de « films d'auteur » ou de blockbusters américains contemporains ?
Comment les cinéastes-auteurs ont-ils influencé la création télévisée sérielle ? Et en quoi cette influence permet-elle de problématiser la notion d'auteur dans le domaine de l'audiovisuel ?
A quoi reconnaîtrait-on alors un auteur de télévision (choix d'acteurs, récurrences de thèmes, usages de procédés narratifs ou de figures esthétiques...) ?

Les propositions de communication (500 mots) sont à envoyer au plus tard le 03/01/2016. accompagnées d’une courte bio-bibliographie et de votre adresse de contact à :
Maxime Scheinfeigel : maxime.scheinfeigel@univ-montp3.fr
Julien Achemchame : julien.achemchame@univ-montp3.fr
Céline Saturnino : celine.saturnino@univ-montp3.fr

La sélection des interventions sera communiquée par courriel au plus tard le 31/01/2016.
Une publication des travaux pourra être envisagée.